POLLUTIONS de l’air Aigües, que fait la France ?

, par  Marie-Odile NOVELLI , popularité : 0%

Malgré les alertes sanitaires et les menaces de sanctions financières de la cour de justice de l’Union européenne, 
la France ne respecte pas les normes 
européennes de qualité de l’air.


La France a enregistré vendredi 13 décembre un cinquième jour consécutif d’alerte aux particules le plus grave épisode de pollution de pollution depuis décembre 2007.

L’Ile ­de­ France, Rhône­Alpes, les Hautes­Pyrénées et l’Oise restaient concernés par un pic de pollution aux particules fines.
Malgré les alertes sanitaires, en dépit des menaces de sanctions financières de la cour de justice de l’Union européenne, la France ne respecte pas les normes 
européennes de qualité de l’air. Douze millions de Français vivent dans des zones 
où les limites annuelles d’émission de particules PM10, extrêmement 
nocives pour la santé, sont dépassées. 60 % de la population est exposée à un air dégradé , principalement dans les grandes agglomérations, 
mais pas seulement. 
La vallée de l’Arve par exemple, au pied des Alpes, entre Chamonix et Cluses 
(Haute­Savoie), est régulièrement en alerte, victime du trafic international 
des camions.

Lire aussi l’édito : Paris pollué, politiques irresponsables

La région Ile­ de­France est chroniquement concernée par les dépassements 
en matière de particules fines mais aussi de dioxyde d’azote. 
En 2012, trois millions de Franciliens ont été exposés à des niveaux de 
pollution trop élevés. 
Les mesures prises ces derniers jours par les préfectures ne sont pas à la mesure 
de l’enjeu. A Paris, elles se sont limitées à un abaissement de la vitesse autorisée, à l’interdiction des feux 
de cheminéeen foyer ouvert et à l’incitation pour les poids lourds de plus de
 3,5 tonnes en transit à contourner l’agglomération parisienne.

PAS DE PÉAGES URBAINS

Ces dernières années, la France a échoué, malgré les recommandations 
du Grenelle de l’environnement, à instaurer des zones de protection de 
l’atmosphère, comme il en existe en Allemagne, au Royaume Uni et en Italie. 
Deux cents villes en Europe se sont dotées de ces dispositifs d’accès restreint, 
où sont notamment bannis en permanence les véhicules les plus polluants.

Les Allemands, pionniers, en disposent d’une soixantaine. 
Berlin arrive désormais en tête des grandes villes européennes
 pour sa qualité de l’air, suivie de Copenhague, qui s’est fixé pour objectif 
d’atteindre la moitié des déplacements de ses habitants en vélo, et de Stockholm. 
Cette dernière, comme Londres, Oslo et Milan, a également instauré des péages urbains, une solution que la France 
rejette pour l’heure, au nom de la justice sociale. « La première cause d’exposition de la population dans les grandes agglomérations est le trafic automobile ; c’est donc là qu’il faut agir, en restreignant l’usage de la 
voiture, en développant les transports en commun propres, les plans de 
déplacement des entreprises », dit Jérôme Clave, le directeur d’Airparif, 
association chargée de la surveillance de la qualité de l’air de la région parisienne.

Décidée par le gouvernement de François Fillon en 2010, la création de
« zones d’action prioritaires pour l’air » dans huit agglomérations avait été avortée en septembre 2012 par Delphine Batho. 
La ministre de l’écologie avait alors annoncé un « plan d’urgence », sans ambition, qui reposait principalement sur des plans locaux de protection de l’atmosphère contraignants.

FISCALITÉ AVANTAGEUSE DU DIESEL

La France se refuse par ailleurs à aligner la fiscalité avantageuse du diesel 
sur celle de l’essence, alors que celuici est un gros émetteur de particules 
fines et classécancérogène par l’Organisation mondiale de la santé. 
Elle dispose du parc automobile le plus « diésélisé » au monde, et vieillissant.

Les trois quarts des véhicules particuliers diesel ne sont pas équipés de filtres à particules. Or, une étude d’Airparif a montré que le remplacement de tous 
les véhicules particuliers diesel par des véhicules essence (norme Euro) 
permettrait d’abaisser de 25% à 35 % les émissions de particules fines et 
de 35 % les rejets d’oxyde d’azote en Région parisienne. 
Mais ce transfert n’aurait pas que des avantages : il augmenterait de 6 % les rejets de dioxyde de carbone, principal gaz à effet de serre responsable du réchauffement climatique.

Le 18 décembre, la Commission européenne doit présenter une révision de
 sa législationsur la qualité de l’air. 
Spécialistes et associations écologistes espèrent des normes plus restrictives. Ils s’appuient sur une étude financée par l’Union européenne, publiée par la revue scientifique The Lancet le 9 décembre, qui révèle qu’une exposition prolongée aux particules fines a un effet néfaste pour la santé à 
des concentrations bien inférieures aux normes actuelles.

• Sophie Landrin 

Journaliste au Monde