Une démocratie dégradée ?

, par  Marie-Odile NOVELLI , popularité : 0%

Difficile de ne pas voir que les reculs des politiques écologiques ont lieu dans un contexte de montée de l’individualisme, de l’intolérance et des populismes, favorisés par le développement des réseaux d’information numériques ; tandis que la violence sociale croissante, notamment dans les domaines politiques et économiques (« entreprises nations ») s’accompagne d’une valorisation de la puissance et de la recherche de domination au détriment du droit .

Ainsi aux Etats Unis, le désengagement du Président Trump des Accords sur le Climat s’accom-pagne d’une communication agressive qui met en doute les recherches scientifiques. Plus grave, il est accompagné d’une mise en cause des lois et règles communes, de la liberté de la presse, de l’ Etat de droit. Seule semble compter la puissance et le désir individuel.
Sommes nous épargnés en France et en Europe ?
NON. L’atteintes aux libertés n’est pas réservé aux « dictatures démocratiques populaires » -définition constitutionnelle du régime Chinois- tout comme développement des privilèges oligarchiques occidentaux n’épargne pas non plus les régimes non démocratiques.

Ici aussi, en Europe et en France, les tentatives de s’affranchir des lois communes existent y compris de la part de ceux qui ont exercée les plus hautes fonctions. Les tentations autoritaires aussi : après avoir incité les citoyens à prendre la parole lors du grand débat de 2019, qui a généré quelques 2 millions de réponses en ligne et 10 000 réunions publiques , que s’est il passé ? Un enterrement savant des questions posées.
Il en va de même pour ce qui concerne les enjeux climatiques, qui avaient fait l’objet d’une conférence de consensus. Un débat modèle, entre citoyens tous différents et non experts, mais qui, en travaillant sérieusement avec une variété de scientifiques et de praticiens, sont parvenus ensemble à rendre un avis argumenté. Aujourd’hui encore, les citoyens expriment fortement, lors des sondages, une volonté de justice fiscale et d’équité territoriale notamment concernant l’accès aux services publics. Et donc ? L’oligarchie(?) au pouvoir n’en tient absolument pas compte.
De plus en plus de chef d’Etats n’appliquent plus les accords internationaux. Dans un contexte de croissance des oligopoles économiques, comment s’étonner de l’incapacité des Etats à jouer leur rôle de régulateur ?…Le système démocratique semble à bout de souffle.

La solution pourtant ne repose pas uniquement sur une simple question de technique d’élection : le problème parait plus profond…

La démocratie, avec ses cycles électoraux courts, valorise l’opinion, la satisfaction immédiate, les effets de communication, les calculs à court terme. Elle n’est pas à même de penser le temps long, indispensable à la mise en place d’une planification écologique socialement juste et économiquement pertinente ( ce pour quoi la Chine serait a priori plus armée) .
La démocratie est exigeante : dans une société complexe, elle exige de la réflexion, issue aussi bien des expériences du passé que des recherches scientifiques, techniques, psychosociales…Le contraire de la démagogie, qui nous conduit droit dans le mur. Surtout, elle exige une clarification et mise en lumière des valeurs et finalités humaines auxquelles nos sociétés doivent tendre, sans confondre la fin et les moyens : le souci de la planète et des generations à venir, sans lesquels il n’y pas de futur, la considération humaine qui est l’inverse du mépris, l’acceptation de l’interet général …

Comme l’évoque le chercheur Maxime Nechtschein, «  la promesse politique des démocraties libérales était adossée à la promesse matérielle : plus de droits, plus de libertés, plus de liens, de mobilité, de confort. Cette promesse rendue possible grâce l’exploitation massive des énergies fossiles se heurte aujourd’hui à l’épuisement des sols, des eaux, des énergies, à l’effondrement du vient et au degrèglement climatique. Le rêve du toujours plus pour tous a pris fin ».

Une réalité difficile à accepter. Voilà qui peut motiver un « écolobashing » !
En fait il nous faudrait amorcer une mutation anthropologique, un changement sociétal. Impossible ? Non désirable ?… Mais dans le fond, avons nous vraiment besoin de toujours plus d’objets, de déplacements et de moyens d’évasion mercantiles ? N’y a-t-il pas d’autre formes de créativité et de relations humaines qui nous rendraient heureux (nous rendent déjà heureux) ? Ca et là, des initiatives locales, et des pratiques humaines démontrent le contraire..